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vendredi 31 octobre 2014

Les boycotts ont des effets incertains

L’appel au boycott n’est pas toujours couronné de succès. 

Peu de chefs d'Etat occidentaux se sont ainsi déplacés à Sotchi, mais leurs fauteuils vides ne se sont pas pour autant traduit par un véritable boycott. 

Pourtant, de nombreuses associations avaient accusé la Russie de bafouer des libertés fondamentales, notamment celles de la communauté gay. 

C’est un britannique qui a donné son nom au mot boycott : Charles Cunningham Boycott (1832-1897).

Ancien militaire, il est devenu intendant d’un riche propriétaire terrien dans le comté de Mayo (Ouest de l'Irlande). En 1879-80, alors que l'Irlande était en pleine famine, Charles Boycott refusa une baisse des fermages.

Selon la République des Lettres, Charles Stewart Parnell, avocat protestant et jeune député à la tête de la Ligue agraire, mobilisa alors ces derniers afin qu'ils obtiennent de meilleures conditions de travail. La population du comté décida de mettre leur régisseur en quarantaine. Charles Cunningham Boycott fut ainsi privé de toute relation personnelle, économique et professionnelle. Les fermiers refusèrent de payer et les ouvriers agricoles de travailler.

Le capitaine Boycott (portrait ci-dessous dans Vanity Fair) dut alors embaucher 50 ouvriers du Nord, protégés par des centaines de militaires britanniques. Au final, toutes ces dépenses dépassèrent le produit de la récolte. L’année suivante, Charles Boycott fut remplacé et rentra en Angleterre.



Le procédé fut ensuite appliqué ailleurs et les propriétaires qui expulsaient leurs fermiers ou les traitaient trop mal se retrouvaient du jour au lendemain sans domestiques pour les servir et sans revenus à tirer de leurs terres.

Cette affaire a du faire grand bruit, puisque le mot "boycottage" aurait fait son entrée dans la langue française dès 1881.

Plus récemment, d’autres boycotts ont défrayé la chronique.

Sodastream, un boycott devenu médiatique 

Selon l’AFP, SodaStream International, une entreprise israélienne fabriquant des machines à gazéifier les boissons, vient d’annoncer la fermeture de sa principale unité de production, l'usine de Mishor Adoumim, située dans une colonie de Cisjordanie occupée.

Une implantation mise à l’index par le mouvement BDS ("Boycott, désinvestissement, sanctions"), qui qualifie SodaStream de "profiteur de l'occupation" israélienne.

Néanmoins, un représentant de SodaStream, Nirit Hurwitz, a précisé cette semaine que cette relocalisation s’expliquait par des raisons purement commerciales. L’entreprise n’aurait donc pas cédé à la pression.

Au-delà du cercle des militants, la querelle a connu une véritable caisse de résonance début 2014, lorsque la firme fit appel à l’actrice et chanteuse américaine Scarlett Johansson pour sa promotion. 

L'actrice expliquait dans un des spots pouvoir boire des sodas en bonne conscience sans polluer la planète avec des bouteilles en plastique puisque les machines de SodaStream permettaient de préparer des boissons à domicile.

 

Alors que l’actrice était Ambassadrice d’Oxfam depuis 8 ans, Oxfam s’est retrouvée en position inconfortable. Pour finir, Scarlett Johansson a rompu ses liens avec Oxfam en raison d'une "différence fondamentale d'opinion" sur le boycott.

Oxfam avait connu un problème similaire en 2009, lorsque son ambassadrice, Kristin Davis, héroïne de Sex and the City, avait signé un contrat avec une société de cosmétiques israélienne, présente dans le « West Bank ».

Mais, dans ce cas précis, la star avait fini par rompre son association avec l’entreprise.



Haro shakespearien sur certains hôtels de luxe contre la charia

Les enseignes du Dorchester Collection, à Paris, le Plaza Athénée et le Meurice, propriétés du sultan de Brunei, ont été boycottées par de nombreuses personnalités depuis que la charia a été instaurée dans son micro-Etat de l'île de Bornéo.

Cette initiative a recueilli le soutien de chefs d’industrie comme François-Henri Pinault, le PDG du groupe de luxe Kering (Gucci, Bottega Veneta, Saint Laurent, Brioni, Boucheron, etc.), et Richard Branson (fondateur de Virgin). 

De même pour Anna Wintour, rédactrice en chef de l'édition américaine du magazine Vogue depuis 1988.




 Même levier de bouclier contre le Beverly Hills Hotel. 

Néanmoins, des voix discordantes ont aussi surgi à Hollywood, notamment sur les conséquences sociales d’un tel ostracisme. 




Pour les autorités publiques, ce qui ressort de l'intervention de Jen Psaki, porte parole du gouvernement américain, ce genre d’actions est inacceptable, ces hotels respectant la législation sociale des pays où ils sont actifs.

Mais, selon le Monde du 24 octobre dernier, dans un article intitulé « La valse des palaces », l’épidémie de défections de stars de l'été auraient eu l’effet d’un coup d’épée dans l’eau. 

Georges Panayotis, Dirigeant de MKG Group, assure ainsi « Depuis sa réouverture en août, le Plaza est plein, tout comme le Meurice. » 

Pas besoin de boycott contre Lego 

Dans son objectif ultime de bousculer Shell par tous les moyens, même sur des terrains inhabituels, Greenpeace a ciblé cette année un de ses partenaires historiques, le célèbre fabricant de figurines Lego. Néanmoins, l’association environnementale n’a pas poussé les consommateurs à bouder cette marque très populaire et très rentable. Dans une partie de billard à plusieurs bandes, Greenpeace a préféré recourir à la pétition, à la vidéo et aux réseaux sociaux pour générer du buzz. Pourtant, cela ne l’a pas empêché d’obtenir gain de cause, Lego ayant finalement annoncé une rupture de ses relations avec Shell. 




Voici la profession de foi de l’ONG : 


 «Nous n’appelons pas à un boycott de LEGO. Car nous sommes nous-mêmes des fans de ces mini figurines et de leurs infinies possibilités de création. Nous aimons donc LEGO, mais nous haïssons la menace que représentent les forages pétroliers en Arctique. Oui, les LEGOS sont des figurines fabriquées à partir de plastique, donc de pétrole. Mais LEGO s’est déjà engagé à remplacer ce pétrole par une alternative durable à l’horizon 2030 ». 

Selon le blog du communicant, Greenpeace a mis Lego face à ses propres contradictions. 

En effet, l’entreprise ne pouvait pas ignorer que son partenariat avec Shell n’était pas cohérent avec sa propre politique sociétale et environnementale à long terme.


Une technique complexe 

 Ainsi, dans les boycotts les plus récents, ce sont toujours les questions patriotiques, politiques, sociales et environnementales, qui figurent au premier plan. 

Si l’idée du boycottage est simple à comprendre, ce qui en fait sa force, son application sur le terrain est parfois compliquée. On reproche aussi au boycottage de simplifier les problèmes et d’être trop frontal, à la limite de la légalité. 

 Son succès passe également par la capacité de ses organisateurs à modifier les habitudes des consommateurs et par l’existence de produits de substitutions, ce qui n’est pas toujours le cas. Les pétitions en ligne ont le vent en poupe actuellement. 


Pour aller plus loin : 

L’efficacité des pétitions 
http://ong-entreprise.blogspot.fr/2010/12/pour-les-associations-la-bonne-vieille.html 

Scarlett Johansson lâche parodiée sur Internet. L’Express.30.01.2014. 
http://www.lexpress.fr/styles/vip/scarlett-johansson-n-est-plus-ambassadrice-pour-oxfam_1318784.html 

Communiqué de presse d’Oxfam 
http://www.oxfam.org/en/pressroom/reactions/oxfam-accepts-resignation-scarlett-johansson 

Oxfam under pressure to cut ties with Scarlett Johansson over SodaStream ad. 
The Guardian 29.01.2014 
http://www.theguardian.com/society/2014/jan/29/oxfam-pressure-scarlett-johansson-sodastream-israel 

Sur les palaces
 http://www.europe1.fr/international/pourquoi-anna-wintour-appelle-a-boycotter-le-meurice-a-paris-2138351 
http://www.lesechos.fr/13/05/2014/LesEchos/21686-091-ECH_le-plaza-athenee-et-le-meurice-boycottes-par-kering-et-virgin.htm?texte=dorchester#M4W8LIxhbxiBkggs.99 

Le blog du communicant (Olivier Cimelière) @olivcim 17 octobre 2014 http://www.leblogducommunicant2-0.com/2014/10/17/communication-dinfluence-avec-le-retrait-de-lego-greenpeace-fait-coup-double-contre-shell/

1 commentaire:

Herrick du Halgouët a dit…

Pour info, Oxfam tient à préciser qu'il ne finance aucune activité promouvant un boycott, le désinvestissement ou des sanctions.

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