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vendredi 2 juin 2023

ZAN : iI était temps de limiter l’artificialisation des sols en France


Votée en août 2021, la « loi Climat et résilience » portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets fixe un objectif de zéro artificialisation nette des sols à l’horizon 2050. 

Cela représente une véritable révolution copernicienne tant la bétonisation a fait partie de notre quotidien et à remodeler les paysages à force de nouveaux lotissements ou d’axes routiers depuis plusieurs décennies. 

D’après Agreste, au cours des quatre dernières décennies, les espaces artificialisés ont augmenté de 72 % en France métropolitaine, de 2,9 à 5 millions d’ha entre 1982 et 2018, soit + 57.600 hectares par an en moyenne (+ 1,5 %). 

En 2018, les sols artificialisés couvrent 8 % de l’ensemble du territoire français y compris les cinq départements d’Outre-mer (DOM). 

Sur la même période, les terres agricoles ont perdu 7,7 % de leur surface en France métropolitaine soit 2,4 millions d’ha. Ces pertes représentent 4,3 % de la superficie totale du territoire métropolitain, soit l’équivalent de l’ancienne région Lorraine. 

Et, dans le même temps, les espaces naturels (sols boisés, landes et friches, sols nus, zones sous les eaux) ont gagné 299.000 ha en France métropolitaine. 

D’après le Memento 2022 de l’IGN, la production biologique « nette », c’est-à-dire la croissance des arbres, mortalité des arbres déduite, est supérieure aux prélèvements. Toutefois, encore à hauteur de 5,3 m³ par hectare et par an il y a une décennie, cette production biologique « nette » est aujourd’hui de 4,8 m³ par hectare et par an, ralentissant de 10 % environ. 

L’artificialisation des sols serait trois fois plus rapide que la hausse de la population 

Alors qu’entre 2007 et 2017, le nombre d’habitants en métropole a augmenté de 4,4 %, les sols artificialisés ont progressé de 13,9 %.  Ainsi, en 10 ans, 
  • l’espace artificialisé disponible croît de 698 à 759 m2 par habitant. 
  • Tandis que la surface agricole par habitant diminue de 4.682 m2 à 4.383 m2 par habitant. 
L’habitat individuel est le principal accusé, le réseau routier étant le deuxième facteur. 

Cette bétonisation a permis toutes ces dernières années de couvrir la France d'un réseau très dense de zones commerciales et de lotissements, en particulier en zone péri-urbaine. 

 Pourtant, le sol cultivable est limité sur terre et il est difficile de revenir en arrière. Et, il existe une incertitude sur les rendements agricoles à horizon 2050.

L’artificialisation des sols présente de fortes externalités négatives :

  • Accélération de la perte de biodiversité : Les sols abritent une flore et une faune essentielles. Leurs habitats naturels peuvent être détruits ou amputés, par des obstacles comme les routes, empêchant les animaux de se déplacer, de se nourrir, de se protéger et de se reproduire. 
    • Les vers de terre par exemple permettent selon la LPO le transport et la redistribution de la matière organique à travers les horizons minéraux du sol. Ils créent des galeries, décompactent les sols et permettent ainsi la circulation de l’eau.
    • Selon l’INRAE, un gramme de sol contient un milliard de bactéries, de cent mille à un million d’espèces différentes. A ce titre, le sol constitue l’un des plus grands réservoirs de biodiversité et de ressources génétiques de notre planète.
  • La pollution : La bétonisation induit des nuisances sonores et de la pollution lumineuse. Et, l’étalement urbain engendre des déplacements en voiture sur des zones jusque-là calmes. Tout nouvel axe routier génère du trafic supplémentaire.
  • Réchauffement climatique : Dans la nature, après les océans, ce sont les forêts, les tourbières et les prairies qui constituent les principaux puits de carbone. Selon l’ADEME, 4 à 5 milliards de tonnes de carbone seraient stockées dans les sols et forêts de France métropolitaine. Autant d’écosystèmes à préserver. 
  • Amplification de l’impact des inondations du fait de l’imperméabilisation des sols. Selon un rapport public de 2019, le coût annuel moyen des dommages causés par les inondations (et assurés au titre du régime Catastrophes Naturelles) s’élève à 520 millions d’euros en France. Le ruissèlement est encore plus violent sur des terres arides, marquées par la sécheresse, comme en Espagne en ce moment. Entre 1999 et 2006, près de 100.000 logements ont été construits dans les zones inondables de 424 grandes communes. • Réduction de la surface disponible consacrée à la culture et l’élevage.
  • Accroissement des dépenses liées aux réseaux : pour être viable, un terrain artificialisé nécessite souvent beaucoup d’entretien et d’efforts d’aménagement (route, ronds-points, assainissement, fibre).
  • Réduction des liens sociaux : L’étalement urbain relègue une partie des habitants à l’écart du centre-ville, provoquant sa désertification et la dévalorisation des petits commerces. Face à ces défis, un nouveau métier est même apparu ces dernières années : « manager de centre-ville », chargé notamment de faire revenir les commerçants et les centres médicaux.
Dans ce contexte, il était temps de limiter l’artificialisation des sols via une véritable rationalisation des permis de construire et la valorisation de l’existant (dents creuses, friches,…).

 Une renaturation complexe

 Dans certains cas, il va falloir restaurer du foncier dégradé afin de répondre aux besoins de construire de nouveaux bâtiments. France Stratégie indique que la renaturation d’un sol artificialisé n’est pas simple.

  • Cela coûte de 100 à 400 euros le m2, selon son degré d’altération, hors coût de déconstruction.
  • A comparer au prix moyen d’un terrain constructible qui serait actuellement de 165€ le m2.
  • 167 tonnes de déchets sont produites en moyenne par un chantier de démolition de bâtiment.
Votée en août 2021, la « loi Climat et résilience » portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets fixe :
  • un objectif de zéro artificialisation nette des sols à l’horizon 2050, entendue comme « le solde de l’artificialisation et de la renaturation des sols constatées sur un périmètre et une période donnés ».
  • et l’obligation pour les territoires de réduire de moitié, par rapport à la période entre 2011 et 2021, le rythme de consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers d’ici à 2031.

 Cette loi va pousser à concentrer les nouveaux projets de construction là où ils sont les plus utiles, ce qui va poser de nouveaux défis et de nombreuses questions. Avec des opérations plus compactes (densification urbaine). Et à limiter les logements vacants et à recycler l’ancien.

 Des projets qui avortent

 Fin 2019, le projet Europacity a été abandonné malgré le soutien d’élus locaux. Ce centre commercial géant, qui devait se situer à Gonesse dans le Val d’Oise, étaient critiqué par les écologistes et des associations de commerçants.

 D’autres projets d’aménagement du territoire sont sur la sellette en ce moment comme l’autoroute A69 Toulouse-Castres et le contournement Est de Caen.

Les opposants ne sont pas forcément dans une logique NIMBY, not in my backyard, mais plutôt dans une revendication "ni ici, ni ailleurs".

 Optimiser l’existant

 Bonne nouvelle, la France aurait déjà fait le plein en matière d’hypermarchés. Selon LSA, il en existait en effet 2.257 en 2020 représentant une surface de près de 12 millions de m2.

 Dans la même logique, ce foncier va être exploité de manière intelligente. La loi d’accélération de la production d’énergies renouvelables (loi APER du 10 mars 2023) prévoit en effet que les parcs de stationnement extérieurs de plus de 1.500 m² devront être équipés, sur au moins la moitié de leur superficie, d’ombrières intégrant un procédé de production d’énergies renouvelables sur la totalité de leur partie supérieure assurant l’ombrage.

 

 

Pour aller plus loin

Résidence individuelle : ennemie de la planète ? (magazine Pour l'Eco)

 

Libé :
D’après Libération, en date du 1er juin, la forêt française a absorbé 7,5% des émissions nationales avec 30 millions de tonnes de Co2eq. Ce serait deux fois moins qu’il y a dix ans. Les terribles incendies de 2022 ont détruit 5 millions de tonnes de Co2eq. Les coupes de bois ont aussi affecté certaines zones forestières comme la Corse depuis dix ans et plus récemment le Grand-Est et les Hauts de France.

 

Un marché du logement en berne
De mai 2021 à avril 2022, 500.400 logements ont été autorisés à la construction (+ 20,7 %). C’est la première fois que le nombre de 500.000 autorisations sur 12 mois est dépassé depuis près de 10 ans (de septembre 2011 à août 2012). Néanmoins, ces chiffres ont nettement baissé depuis. De mai 2022 à avril 2023, 431.800 logements ont été autorisés à la construction (- 14,3 % sur un an). C’est 6,2 % de moins qu’au cours des douze mois précédant la crise sanitaire (mars 2019 à février 2020). Le secteur de la construction subit une inflation des coûts et le recul des crédits immobiliers en raison de la hausse des taux d’intérêt. Le reste

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Début juin, Sophie Primas, Présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, a fustigé l’absence d’exemption des grands projets industriels du décompte du ZAN. Bruno Le Maire a défendu cette exemption, tout en précisant que l’arbitrage n’avait pas encore été rendu au sein du gouvernement.

Anonyme a dit…

Finalement, la « garantie rurale », permettant de réserver à certaines communes un « droit à construire » de 1 hectare, a été légèrement amendée. Au total, 31.000 communes sont y ainsi éligibles, dont 17.000 pourraient effectivement en avoir besoin.

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