Si le lectorat a tendance à s’éroder dans le monde, du fait notamment de la tentation du tout numérique gratuit, la presse écrite génère encore de belles idées.
De nouveaux titres apparaissent comme Debout, lancé cette semaine. Et, l’édition n’est pas en reste avec de nombreux Mook (XXI, Revue Dessinée, Charles, L’Eléphant, Usbek & Rica, etc.).
Néanmoins, il leur est parfois difficile de séduire les investisseurs issus des circuits traditionnels. Les médias les plus populaires n’hésitent donc plus à s’adresser à la foule.
L’exemple de Nice Matin
Après le redressement judiciaire du groupe Nice-Matin prononcé par le Tribunal de Commerce de Nice fin mai, les salariés du groupe, mécontents des offres de reprise en cours, ont lancé un appel aux dons. Leur idée était de rassembler 300.000 euros pour pouvoir reprendre leur journal en SCOP et en devenir actionnaires majoritaires à hauteur de 60 %. Leurs espoirs ont été comblés, puisque la barre des 300.000 euros a été dépassée au mois d’août sur la plateforme de crowdfunding Ulule, 23 jours avant la deadline, prévue le 20 septembre 2014.
Ce mode de financement contribue également à conférer aux journaux une plus grande indépendance. Des donateurs récompensés comme il se doit en matière de crowdfunding.
Pour 5€ et plus, Nice Matin proposait d’afficher votre nom et votre photo dans le premier journal réalisé par la nouvelle société coopérative créée par les salariés.
Pour 50€ et plus, ils bénéficiaient d’un abonnement numérique au journal Nice-Matin, Var-Matin ou Corse-Matin pour une période de deux mois (prix normal de l’abonnement : 64 euros).
Spear pour les épargnants solidaires
Altermondes cherche à lever des fonds sur la plateforme de financement participatif Spear. Altermondes se définit comme une revue de solidarité internationale.
Depuis 2005, la revue traite de nombreux sujets tels que la problématique du logement, le commerce équitable, ou l’économie sociale et solidaire, en proposant une démarche collective et participative de production de l’information.
Elle sollicite un prêt de 20.000 euros pour financer son développement : une distribution en kiosque, une revue plus exigeante sur le contenu, un nouveau site internet. 8.000 euros ont déjà été collectés.
Les épargnants qui soutiendront ce projet recevront un exemplaire de la nouvelle formule de la revue, et seront également invités par la rédaction à l'événement de lancement organisé en septembre 2014.
Terra Eco en péril
Si Altermondes cherche à financer son développement, Terra Eco joue pour sa part sa survie. Il lui manquerait seulement 2.000 abonnés pour atteindre le point mort. Fondé en janvier 2004 par un quatuor, dont Walter Bouvais, ce mensuel emploie 21 salariés à Paris et à Nantes. Outre 15.000 abonnés, Terra Eco revendique 300.000 lecteurs, sur Internet inclus. Terra Eco dispose même de plus de 33.000 followers sur Twitter et de 13.830 amis sur Facebook.
Il recherche 500.000 euros sous des formes diverses (capital, dons et abonnements).
Certaines personnalités ont d’ores et déjà affiché leurs soutiens comme Isabelle Autissier et Delphine Batho. Le sauvetage du magazine fait aussi beaucoup parlé de lui sur Twitter.
En dix ans, le magazine est bien installé, car il a réalisé 170 numéros. Très actif en ligne, il compte aussi une édition quotidienne électronique. Terra eco se définit comme un magazine sociétal tourné vers ceux qui expérimentent de nouvelles façons de faire.
D’autres titres existent dans la même veine comme Socialter, We Demain et Up Magazine (anciennement Interdépendance, groupe SOS).
Impact Journalism Day 2014
Par ailleurs, sachez que ce weekend, 40 journaux leaders du monde entier publieront chacun, simultanément, un supplément inédit sur les solutions concrètes qui changent le monde.
Un but : inspirer les lecteurs pour qu’ils deviennent à leur tour acteurs du changement. C'est l'Impact Journalism Day 2014, créé par Sparknews. Cette initiative est soutenue par le groupe d’assurance Axa.
Vidéo réalisée à l’occasion d’une campagne de crowdfunding sur Kisskissbankbank. Vidéo réalisée par Videaux
Impact Journalism Day - Sparknews' Crowdfunding Campaign from Videaux on Vimeo.
N'oubliez pas d'acheter votre journal avec le supplément Impact Journalism Day :
- Samedi 20 septembre : sortie mondiale dans ses journaux partenaires,
- Dimanche 21 septembre : sortie UK dans le Sunday Times,
- Lundi 22 septembre (après-midi) / mardi 23 septembre (matin) : sortie française dans Le Monde,
- Samedi 27 septembre : sortie belge dans Victoire, le magazine du journal Le Soir. 60 pages dédiées.
Pour aller plus loin :
http://www.terraeco.net/sauvezterra
http://www.spear.fr/
Debout, le magazine gratuit destiné aux plus démunis, propose conseils, fiches pratiques et bons plans. Il doit être distribué dans les associations, mairies ou organismes sociaux.
Debout bénéficie du soutien de partenaires financiers : Fondation d’entreprise Carrefour, Groupe La Poste, la Banque Postale, Renault et Caritas France.
http://debout.fr/
http://www.up-inspirer.fr/magazine
http://www.socialter.fr/
http://www.wedemain.fr/
Sur le photojournalisme :
http://ong-entreprise.blogspot.fr/2012/06/ong-et-photojournalistes-entretiennent.html
L’actualité du financement participatif avec goodmorningcrowdfunding
Lancé en 2012 par Christian de Boisredon (fellow Ashoka), Sparknews est une entreprise sociale, au cœur des grands médias et de l’innovation sociale. Sa mission consiste à partager au plus grand nombre les solutions et initiatives inspirantes pour pousser à l’action.
http://www.sparknews.com/fr
3 commentaires:
Je relais ici un article de La Croix du 12 octobre, rédigé par Florence Pagneux
« Sauvez Terra eco. » La couverture d’octobre relaie le message. Dix ans après son lancement, en 2004, le magazine Terra eco a lancé mi-septembre une opération de financement pour éviter sa fermeture et la perte de 21 emplois directs et indirects, dont six postes fixes de journalistes. Cet appel à souscriptions de 500 000 € s’adresse aux lecteurs et investisseurs.
En une vingtaine de jours, plus des deux tiers des fonds ont déjà été récoltés, et 1 700 nouveaux abonnements enregistrés. « C’est un chiffre historique, commente David Solon, directeur de publication, qui nous conforte dans l’idée que notre lectorat est sensible à nos sujets. »
Des négociations sont en cours avec une demi-douzaine d’investisseurs potentiels, en plus des actionnaires historiques du journal. La société Terra eco affichait un chiffre d’affaires de 1,6 million d’euros en 2013, tout en enregistrant un résultat négatif faute de rentrées d’argent suffisantes « en partie liées, comme dans la presse en général, à l’érosion des recettes publicitaires », commente celui qui a déjà connu 170 bouclages.
« Tout a commencé sur un bout de papier, sur lequel on notait ce qu’on avait envie de raconter et qu’on ne lisait pas ailleurs », se rappelle cet ancien journaliste économique au Revenu , fondateur du journal en compagnie de Walter Bouvais, journaliste à L’Expansion , et d’un proche informaticien. Après une mise initiale de 1 500 € et la contribution d’une vingtaine de journalistes bénévoles pour assurer son envol, le journal se mue en 2005 en une entreprise nantaise.
D’abord hebdomadaire, Terra eco devient mensuel en arrivant dans les kiosques en 2009. Il revendique à présent 15 000 abonnés (Web et papier) et 300 000 lecteurs.
Un manifeste rappelle sa ligne éditoriale : un journalisme à rebours de l’immédiateté, soucieux de « donner la parole à ceux qui l’ont perdue et de questionner ceux qui la confisquent », qui rende compte des initiatives citoyennes rompant avec le modèle traditionnel.
Dans ses pages, un entretien fleuve avec Edgar Morin, un reportage sur des réfugiés climatiques français, une enquête sur les perturbateurs endocriniens, un décryptage de la communication des grandes marques…
Si le journal atteint ses objectifs, il proposera une offre renouvelée, et représentera les lecteurs à son conseil d’administration. « Le positif dans cette histoire, c’est que les gens redécouvrent que l’information a un prix. »
Pour info, un communiqué de presse du 7 novembre 2014
Le Tribunal de commerce de Nice a retenu, ce vendredi 7 novembre, la candidature de la coopérative des salariés de Nice-Matin pour la reprise de leur Groupe. Une belle victoire saluée par Alain Maïssa, Président de l'Union Régionale des SCOP Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse qui soutient ce projet depuis le début.
« Malgré les difficultés rencontrées, les salariés ont réussi à aller au bout de leur projet. Dès le début, le mouvement coopératif a été à leurs côtés pour les soutenir tant sur le plan financier que technique », se réjouit Alain Maïssa, Président de l’URSCOP.
Les salariés, qui ont créé une société coopérative d'intérêt collectif (SCIC), deviennent ainsi les associés du groupe Nice-Matin / Var-Matin. La SCIC a provoqué une véritable mobilisation, rassemblant notamment les lecteurs du journal, des entreprises et des collectivités, autour des salariés, et permettant de réunir près de 700 000 euros de dons, via un financement participatif issu de diverses mobilisations citoyennes au niveau local.
Pour le Président de l’URSCOP, « ce dossier se distingue de ceux habituellement traités par le mouvement coopératif de par son envergure et le caractère symbolique qu’il revêt. En optant pour le scénario qui préserve le plus grand nombre d'emplois, soit 948 postes, le Tribunal a choisi de retenir un projet industriel soucieux de l’aspect humain et social. Aux salariés désormais d’écrire leur propre histoire. »
SELON FRENCHWEB
On dit le secteur sinistré. Les marques média historiques peuvent-elles compter sur les aides publiques pour se maintenir ? Les appels aux dons (défiscalisables) ont en tout cas le vent en poupe depuis quelques années. Et pour cause.
En France, la situation financière des journaux dépend en partie des subventions. A ce jour, les trois principaux titres de presse (Le Figaro, Le Monde, Aujourd’hui en France) reçoivent entre 16 et 11 millions d’euros d’aides publiques par an. Depuis 2007, l’association Presse et Pluralisme créée à l’initiative du syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN), permet de bénéficier d’une réduction d’impôt égale à 66% du montant du don. Même indirecte, c’est finalement une nouvelle aide de l’Etat. L’Humanité y a eu recourt en 2011 et avait récolté 1 million d’euros, mais aussi Le Monde Diplomatique, et plus récemment, Charlie Hebdo dont les dons ont atteint 4,2 millions d’euros environ (2,65 millions via le fonds Presse et Pluralisme), selon LeMonde.fr.
Les dons défiscalisés ne peuvent à eux seuls sauver la presse. Le plateforme «J’aime l’info» lancée en 2011 par le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne et par Rue89 n’avait réunis qu’à peine 96 000 euros en 2012. Autant dire une goutte d’eau. D’autres préfèrent tenter la logique du financement participatif sur des plateformes privées. Nice-Matin a ainsi récolté 300 000 euros de dons (non défiscalisés) sur la plateforme Ulule. Tout comme Terra Eco qui a dégagé 100 000 euros en trois semaines en 2104.
«Plus on est atypique, mieux le financement participatif des média peut fonctionner», estime de son côté le média Contrepoints.org, qui affirme une ligne libérale et entend fédérer autour de celle-ci. «Le financement participatif de la presse est une voie qui nous paraît prometteuse, pour encourager le financement de sujets ou d’angles de vue qui sont insuffisamment couverts dans la presse traditionnelle.», précise-il.
Pour sortir de la logique de perfusion directe, les députés ont proposé fin 2014 de créer un nouveau statut d’entreprise solidaire pour les titres de presse. Celui-ci permettrait aux particuliers et aux entreprises d’investir des fonds. Reste à définir le montant de l’abattement. Les actionnaires devront d’ailleurs accepter de «renoncer à une partie des bénéfices pour les réinvestir dans l’activité de la société », avait précisé Fleur Pellerin citée par La Croix. Les nouveaux dispositifs d’aides doivent, eux, être fixés au premier semestre 2015
Mais dons défiscalisés ou non, qui sera prêt à payer pour sauver un journal ? La confiance des Français dans les média est certes un peu revenue en ce début d’année, après des chiffres catastrophiques. 63% des Français font confiance à la radio pour restituer les faits (soit + 5 points par rapport à 2014), 58% pour la presse écrite (+ 3 points), 57% pour la télévision (+ 7 points) et 39% pour Internet (+ 2 points), selon le baromètre annuel LaCroix TNS Sofres publié fin janvier.
Autre frémissement positif, les chiffres de ventes de journaux, dus évidemment au contexte particulier. Au lendemain des attaques à Charlie Hebdo, le 8 janvier, Le Parisien-Aujourd’hui en France a, par exemple vendu 120.000 exemplaires en plus, soit une hausse de 50 %. Les autres quotidiens sont sur la même courbe, éphémère. La reconquête de poches d’audience est donc peut-être possible.
En savoir plus sur http://frenchweb.fr/qui-veut-sauver-la-presse-francaise/184809#OxeUoQoV18S6z6Sc.99
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