Ce rapport présente une actualité certaine, après l’engouement des investisseurs pour Glencore, l’effondrement en Bourse de Vedanta et la réforme du Code minier dans plusieurs pays, notamment en Afrique. Ce post complète l’article précédent traitant du retard des entreprises minières cotées en Europe en matière de transparence.
Les ONG et les entreprises minières nourrissent une grande méfiance respective. La présentation de cette étude lors d’un petit déjeuner a d’ailleurs donné lieu à un débat assez animé entre Catherine Tissot-Colle, Directrice de la Communication et du Développement Durable du Groupe Eramet et Sandra Cossart, Responsable du programme Globalisation et Droits humains de l’association SHERPA.
Les relations ONG/entreprises constituant un thermomètre parmi d’autres du degré de maturité d’une politique RSE, il en ressort que seules 8 des 23 entreprises minières cotées en Europe ont passé ce type d’accords.
- L’association la plus ouverte au dialogue est Conservation International, qui est entrée en relation avec AngloAmerican, AngloGold Ashanti, Arcelor Mittal et Rio Tinto.
- Fauna & Flora International, dont le siège social est à Cambridge(UK), collabore avec AngloAmerican, BHP Billiton et Rio Tinto.
- Mais, le canevas des rapports ONG/secteur minier est complexe, puisque l’entreprise londonienne Rio Tinto a noué des partenariats avec 6 ONG, mais subit dans le même temps les critiques de 3 autres associations...
- Le groupement Amis de la Terre/Friends of the Earth constitue le réseau le plus vindicatif.
Les auteurs de l’étude soulignent que les quelques partenariats existants sont souvent mal valorisés, mal expliqués et insuffisamment connus. A part les accords dans la biodiversité passés entre AngloAmerican et Fauna & Flora d’une part et Vale avec son Vale Fund for Sustainable Development d’autre part, le dialogue secteur minier/ONG ne contribue pas assez, contrairement à une de leur vocation habituelle, à l’amélioration de la perception des entreprises minières.
Même une entreprise proactive dans le champ environnemental, comme la suédoise Boliden, se méfie des ONG. Elle s’est en effet frottée à la fin des années 1990 à Greenpeace et au WWF, à l’occasion de plusieurs accidents médiatisés aux conséquences désastreuses, qui l’ont incité à modifier ses pratiques, sauf en matière de communication. L’étude signale que la société française Imerys ne mentionne pas elle non plus ses relations avec les ONG.
Dans le détail, plusieurs entreprises minières, comme Xstrata, mènent des évaluations d’impacts de leurs activités sur les communautés locales sans passer par les ONG. En Indonésie, sur le site de Weda Bay Nickel, Eramet a lancé des études approfondies sur la santé publique, les habitudes alimentaires des populations locales et le patrimoine culturel. Le groupe français, qui s’était vu décerner le Prix Pinocchio en 2010 sur ce projet, développe par ailleurs des études ethnographiques relatives à une population nomade présente sur et à proximité de la concession.
Si les ONG font figure de David contre Goliath, elles ne manquent en fait pas de ressorts: rédaction de rapports d’expertise (comme celui sur l’or africain, publié par Oxfam France Agir ici et Survie en 2007), réunions de coalitions, plaidoyer et diffusion d’informations. Elles recourent également à l’action judiciaire ou à des les plaintes devant les points de contact nationaux (PCN) pour les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises directeurs de l’OCDE.
Comme SHERPA, qui avec 4 autres associations, a déposé une plainte devant les PCN suisse et canadien à l’encontre de Glencore et de First Quantum pour les manipulations financières et comptables auxquelles leur filiale zambienne, Mopani, aurait recours afin de se soustraire à l’impôt sur place.
Néanmoins, l’industrie extractive n’est pas uniforme entre d’une part des firmes, qui communiquent sur la RSE ou s’engagent sur certaines normes volontaires (Initiative pour la transparence dans les industries extractives « ITIE », Global reporting Initiative, etc.) et celles qui restent imperméables aux thématiques du développement durable et aux injonctions des gestionnaires ISR.
Dans le premier cas, les parties prenantes veillent scrupuleusement à ce que les engagements affichés soient respectés. L’entreprise est redevable de ses engagements et doit rendre compte de ses choix. Tout manquement est dénoncé avec virulence.
Dans le cas des entreprises impassibles comme Glencore, les ONG doivent aller au charbon en alertant la société civile ou les milieux politiques avec pour double objectif de les obliger à modifier leurs pratiques et à devenir plus transparentes. Leur professionnalisme et leur capacité d’entraînement font courir un risque opérationnel aux retardataires.
Or, les signaux alarmants des ONG et des investisseurs engagés ne sont pas neutres. Le refus d’autorisation par le gouvernement indien d’un projet d’exploitation de la bauxite dans la région d’Orissa en Inde fin août 2010 a entrainé une chute de 23 % du cours de Vedanta Resources au London Stock Exchange au mois d’août 2010. Véritable coup de grisou, la capitalisation boursière de Vedanta a même fondu depuis 14 mois de la bagatelle de 3,7 milliards de livres.
Pourtant, en juillet 2010, quelques jours avant l’assemblée générale de Vedanta à Londres, l’agence de notation extra-financière EIRIS et Amnesty avaient explicité dans un rapport les risques majeurs de ce projet, du fait notamment du non-respect des droits des populations locales. Ainsi, les actionnaires de Vedanta avaient été avertis en temps et en heure.
Vedanta mine threatens Indigenous communities from Amnesty International on Vimeo.
La décision des autorités indiennes est arrivée tardivement, mais elle accrédite l’influence des acteurs associatifs et des financiers engagés. La population locale, les Dongrias Kondhs et les communautés vivant dans les collines de Niyamgiri, ont aussi réussi dans cette affaire à trouver des relais puissants loin de leur base, y compris dans des médias comme The Guardian ou des personnalités comme Björk et son association Náttúra.
Ce qui n’est pas toujours le cas, les ressources minières se situant bien souvent dans des zones reculées, des pays pas toujours démocratiques et loin des caméras. C’est pourquoi les ONG du Nord transmettent des savoir-faire aux communautés locales pour qu’elles puissent se faire entendre et se structurer.
Comme l’indique le rapport,"des ONG, souvent de stature nationale ou internationale, contribuent (par la formation, la diffusion de procédures, l’information, etc.) au processus d’amélioration des compétences des individus et au renforcement institutionnel d’une ou plusieurs organisations locales afin de rendre leur action plus efficace."
Mais, la lenteur de la mutation du secteur minier, qui dégage souvent une rentabilité très satisfaisante pour les actionnaires, ne laisse entrevoir à court terme ni une diminution sensible des actions de Justice par les ONG, ni une pause dans l’action pédagogique des investisseurs engagés.
Pour voir le classement des entreprises sur leur engagement philanthropique:
L’étude est téléchargeable ici
Pour aller plus loin :
12/10/2011 Le Monde : Quarante propositions pour "verdir" et réformer le code minier français
La tâche était ardue et, jusqu'à maintenant, personne ne s'y était vraiment attelé. Dans un rapport de près de 400 pages, remis mercredi 12 octobre, à la ministre de l'écologie Nathalie Kosciusko-Morizet, l'avocat Arnaud Gossement avance 40 propositions pour réformer le droit minier français, un vieux monsieur dont la loi fondatrice date du 21 avril 1810…Suivez ce lien pour lire la suite :
http://www.lemonde.fr/planete/article/2011/10/12/quarante-propositions-pour-verdir-et-reformer-le-code-minier-francais_1586225_3244.html
La vidéothèque de Vale Inco Nouvelle Calédonie.
Conformément aux dispositions prévues dans le cadre du Pacte pour un développement durable du Grand Sud, le Comité Consultatif Coutumier Environnemental (CCCE) a été constitué le 29 octobre 2009. Trente pages sont consacrées aux textes constitutifs et aux photos prises lors de la mise en place de cette instance garante de la participation des autorités coutumières au suivi environnemental de l’Usine du Grand Sud.
http://www.vale.nc/pages/videotheque.htm
Mining+Conservation
http://www.conservation.org/sites/celb/Documents/2011.02.02_CELB_Mining_Factsheet_LR.pdf
Article du Soir en Belgique sur le Kivu
La contestation des salariés devant la Justice. 21/09/2011 :
Former gold miners in South Africa are suing industry giant Anglo American in the London High Court for allegedly damaging their health. The former workers contracted lung diseases because of bad ventilation in the UK-based company's South African mines, their lawyers allege. Anglo American says it is in no way liable and is defending the claims.
The BBC's Karen Allen reports.
http://www.bbc.co.uk/news/world-africa-15009307
http://video.fr.ca.msn.com/watch/video/sa-gold-miners-sue-in-uk-court/1estlu0fl?cpkey=c316b3e5-3f9a-4c83-841f-82a59daf7090%7C%7C%7C%7C&src=v5:share:sharepermalink:&from=sharepermalink
Le secteur minier vu sur ce blog :
Côté Investisseurs : Aviva s’est opposé à Vedanta (rémunération excessive des dirigeants, nombre trop élevé d’accidents du travail, atteintes à l’environnement). En savoir + sur Aviva Investors :
http://ong-entreprise.blogspot.com/2011/09/des-ong-et-une-coalition-dinvestisseurs.html
Juin 2010 : Sur la Vale : le point de vue de l’ONG IBase
http://ong-entreprise.blogspot.com/2010/06/long-ibase-scrute-la-politique-de-lula.html
Mai 2010 : le syndicat brésilien CUT donne son éclairage sur la Vale
http://ong-entreprise.blogspot.com/2010/05/bresil-la-cut-salue-des-avancees.html
Juillet 2010. Argentine ; ouverture d’une mine à ciel ouvert à Cordoba
http://ong-entreprise.blogspot.com/2010/07/la-politique-de-rse-des-firmes.html
Février 2011 : Mines au Congo, reportage de Capital Terre par Guy Lagache
http://ong-entreprise.blogspot.com/2011/02/capital-terre-guy-lagache-devoile-le.html
Avril 2011. L’or équitable avec Solidaridad
http://ong-entreprise.blogspot.com/2011/04/solidaridad-sest-rapproche-des-grandes.html