Les partenariats avec le secteur privé, souvent considéré comme le diable par le secteur associatif, représentent un quart du budget de WWF. Pour savoir comment cette stratégie est perçue, l'ONG a demandé à l'Ifop et à l’institut Thema de prendre la température des Français grâce à deux études d'opinion.
Le WWF France, qui compte 160.000 membres, a fait le choix depuis 10 ans de nouer des partenariats avec le secteur privé, les plus anciens étant avec Carrefour et Lafuma. L’association a fait le point sur sa politique de partenariats lors d’une conférence le 13 mai dans les locaux de la Fondation d’entreprise Ricard à Paris, en présence de Patricia Ricard, Présidente de l'institut océanographique Paul Ricard.
Du côté de l’IFOP, qui a interrogé 1.012 personnes en avril 2009, il ressort notamment que les Français considèrent à 78% que les partenariats ONG/entreprises de long terme sur des projets communs de protection de l’environnement sont efficaces. Ils sont aussi 68% à juger efficace la dénonciation des mauvaises pratiques des entreprises par des associations de protection de l’environnement. Pour les sondés, les partenariats permettent notamment de toucher plus facilement les consommateurs (d’accord à 76%), de modifier le mode de fonctionnement productif des entreprises (74%) et procurent aux associations de nouvelles ressources (71%). Mais, 63% d’entre eux soulignent un risque de perte d’indépendance de l’association. Par ailleurs, les Français considèrent à 85% qu’aucun secteur de l’économie ne doit être exclu du champ de la coopération, même si certaines activités semblent moins désirables, comme la banque, l’industrie du tabac, l’armement et la filière nucléaire.
L’étude qualitative menée par Théma portait quant à elle sur l’image du WWF auprès de personnes intéressées par le combat pour l’environnement, donatrices, mais pas encore militante. Une population qui considère que le consumérisme est à la source des problèmes environnementaux et que les entreprises ne se réformeront pas spontanément. Ces groupes distinguent trois familles d’ONG : les ONG qui sensibilisent comme la Fondation Nicolas Hulot (serein, sympathique, populaire, mais exhibitionniste, payé par le grand capital), les ONG qui mènent des actions « subversives » comme Greenpeace (pertinence des dossiers traités, mais radicalité et résultats incertains) et les ONG réformistes comme le WWF ou l’Ademe. Il semble ainsi bien se dessiner dans l’esprit des Français un partage des rôles. Les sondés distinguent des points forts au WWF comme l’action concrète sur le terrain, un travail de fond en partie scientifique, etc., mais aussi des vulnérabilités : trop notable, flou de la stratégie, manque de liens entre donateurs, etc. L’ONG estime avoir résolu ce dernier point en créant un réseau social, planète-attitude, qui donne la parole aux militants.
Alors que la menace de mettre un terme à un partenariat constitue une arme pour l’ONG, aucun contrat n’a été rompu depuis 10 ans. Le WWF procède il est vrai en amont à un système de due diligence avant de se décider, mais contrairement aux aspirations des Français, elle exclue de travailler avec certaines firmes (nucléaire, pétrole, armement et tabac). L’ONG a aussi noué un partenariat depuis 6 ans avec les Caisses d’Epargne, nonobstant l’ostracisme récent du secteur financier. La crise financière n’a pas officiellement affecté le budget de l’association, qui dépend à 25% du monde des affaires. Le grand nombre de contrats permettrait selon l’ONG de s’adapter à la perte de l’un d’entre eux. Néanmoins, deux nouveaux dossiers en cours de réflexion ont été mis en pointillé.
Isabelle Autissier, qui est vice-présidente du premier des quatre groupes de travail du Grenelle de la mer, récemment lancé par Jean-Louis Borloo, a aussi apporté son témoignage. A chaque retour sur terre après une croisière, elle se rend compte du retard accumulé et de nos mauvaises habitudes de consommation. Elle a souligné que les changements climatiques sont lents à mesurer, mais que lorsqu’ils adviennent, ils sont brutaux. Ils ne concerneront pas forcément la génération suivante, mais aussi la génération actuelle, comme dans le cas de la surpêche. En ce sens, l’introduction de quelques produits verts ne saurait suffire. Certains produits ne devraient plus avoir droit de cité. Il y a un virage à prendre et la crise économique constitue bien selon elle une opportunité pour prendre du recul par rapport à certains modes de consommation (fraises en hiver), rejoindre des réseaux de solidarité, faire autrement,…
Cette conférence visait sans doute à calmer les accusations de greenwashing, en provenance d’autres ONG, de journalistes ou de militants en interne, en démontrant que les Français soutiennent les stratégies de coopération avec le secteur privé sur des projets structurant. Un plébiscite de l’opinion publique, qui pourrait aussi pousser certaines firmes à engager davantage le dialogue avec les ONG réformistes, voire avec des ONG de sensibilisation. Néanmoins, il ressort de la conférence un sentiment assez alarmiste, qui doit pousser à l’action, en sachant que les effets positifs des actions menées ne se produisent qu’avec un différé. Les chiffres concrets sur les progrès réalisés par la WWF et ses partenaires ne sauront connus qu’en octobre. Un rapport du cabinet PWC est en préparation. Il va dresser un inventaire des différents partenariats du WWF. Il devrait constituer une « autocritique » et être mis à jour une fois par an.
Accéder à l'étude Ifop en cliquant sur ce lien :
http://www.ifop.com/europe/sondages/opinionf/ongentreprises.asp
Page entreprises de wwf France :
http://entreprises.wwf.fr/
3 commentaires:
Est ce que Lafarge travaille toujours en coopération avec le WWF ?
Ce partenariat qui est l'un des plus ambitieux de l'ONG est géré directement par WWF International; qui est basé en Suisse.
Félicitation pour le lancement de ce blog mêlant actus et articles de fond ! Longue vie à toi et ton blog.
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