mardi 7 juillet 2009

La fiscalité pro-partenariat ONG/entreprises au Brésil n’a pas réduit l’activité de plaidoyer







Les relations entre ONG et entreprises ont connu au Brésil un essor majeur avec le vote de la loi connue sous l’appellation IR-Ecológico 5974/05 en juin 2007, qui a attribué des avantages fiscaux aux donateurs, particuliers et personnes morales.

Pour ce faire, les organisations qui souhaiteraient profiter de ces dispositions sont tenues d'enregistrer les projets admissibles auprès du ministère de l'Environnement. Si le projet est approuvé, les organisations n’ont plus qu’à trouver des sponsors pour collecter des fonds. Les particuliers peuvent déduire jusqu'à 80% de leurs dons, dans la limite de 6% du montant leur impôt sur le revenu. Les personnes morales peuvent déduire jusqu’à 40% de leur don à concurrence maximale de 4% de leur impôt sur les bénéfices.

Cette réforme a fait l’objet d’une étude préalable par le groupe « IR Ecológico», créé en 2005, qui se composait d’ONG, d’entreprises et d’experts, notamment WWF-Brésil, The Nature Conservancy (TNC), Conservation International (CI-Brésil), la Fondation SOS Mata Atlântica, Instituto Socio (ISA), Bureau du Ecological Research (IPE), O Boticario Fondation pour la protection de la nature, Biodiversitas Foundation, l'Institut BioAtlantica et Everardo Maciel, ancien secrétaire fédéral des recettes fédérales.

Les projets environnementaux approuvés par la puissance publique portaient sur divers domaines propres au Brésil, comme la déforestation, la biodiversité, la protection de l’eau et des sols. Cette loi s’est révélée d’autant plus utile, qu’il ne manque pas de projets à financer dans ce gigantesque pays, notamment du fait de la forte présence des indigènes et de la culture du soja. En 2007, le champion pétrolier national Petrobras a ainsi déclaré avoir fait des dons à hauteur de 9 millions d’euros dans des projets sociaux et l’éducation et 20 millions d’euros dans l’environnement. Cet élan de partenariat témoigne une nouvelle fois de l’importance d'une fiscalité incitative pour les donateurs, un constat qui se vérifie aussi en France et aux Etats-Unis.


Néanmoins, selon Taciana Gouveaia, Directrice Executive d’ABONG, interrogée en janvier dernier par Youphil, la crise financière n’aurait pas permis de faire fructifier davantage le dialogue ONG-Entreprises : « nos entreprises sont encore trop figées dans des approches marketing, mais cela ne nous empêche pas d'y réfléchir ». En revanche, si la crise fait sentir ses effets, le rôle pivot des ONG et de la société civile est clairement reconnu au sein du Conseil chargé de gérer les dons collectés pour le « Fonds Amazonie », dont la Norvège a été le premier contributeur.

Mais, le Brésil est aussi le terrain de revendications et d’enquêtes, ce pays étant le théâtre d’abus parfois peu connus en Occident, car de nature sociale et sociétale. Le producteur d’éthanol Pagrisa a été pris la main dans le sac. Il employait 1.000 personnes dans des conditions proches de l’esclavage dans la forêt vierge à 250 kilomètres de Bélem. Cette exploitation a été découverte par une patrouille anti esclave. Dans la semaine suivante, Petrobras a rompu ses liens commerciaux avec Pagrisa.

Il s’agit d’un problème endémique. Dans les années précédant ce scandale, 160 plantations sauvages avaient déjà été découvertes au Brésil. En 2008, encore 5.244 ouvriers ont été sorti de l’esclavage en 2008. Une liste noire a même été établie, qui comprend près de 200 employeurs, pour faire connaître ceux qui ne respectent pas les droits de l’homme. Les banques sont censées en tenir compte avant d’entamer des relations commerciales.

C’est notamment un sujet très suivi par l’ONG Repórter Brasil, qui est aussi active sur la problématique des biocarburants. Compte tenu de la sensibilité des sujets évoqués par Reporter Brasil, l’ONG a décidé de collecter aussi des fonds à l’extérieur de ses frontières, comme auprès de fondations néerlandaises Doan et Cordaid, mais aussi de Solidariedad . Elle est aussi soutenue par des organisations comme la Commission pastorale de la terre (CPT), les Amis de la Terre - Amazonie brésilienne et le Centre pour la vie (ICV).

Signalons pour finir que le monde associatif brésilien n’est pas isolé. Il a bien sûr été très présent à Belém. Autre preuve, fondée au Brésil en 1985, Pro-Natura a été l'une des premières ONG des pays du Sud à s'être internationalisée : à la suite de la Conférence de Rio en 1992 est née Pro-Natura International, association de solidarité internationale dont le siège est à Paris.

De plus, une plateforme comme ABONG, qui fédère une multitude d’associations, discute depuis longtemps avec Coordination Sud. L'ABONG a pour principaux objectifs d'informer, renforcer les capacités, promouvoir et représenter collectivement ses membres dans la sphère publique. Du 6 au 11 juillet 2009, les membres du Groupe de facilitation (GF) du Forum international des plates-formes d’ONG (FIP), vont se rencontrer pour la première fois à Washington, à l’occasion du Forum d’Interaction, la plate-forme nationale des ONG américaines. Le « Groupe de facilitation » est composé de dix plates-formes - ABONG (Brésil), ACCIÓN (Chili), CONGAD (Sénégal), Coordination SUD (France) et VANI (Inde), PIANGO (Océanie), InterAction (États-Unis), Espace Associatif (Maroc), CNONGD (République démocratique du Congo), SADC-NGO Council (Afrique australe).

Cet article a été rédigé en recueillant le témoignage d’Alice Raulo, Diplômée d’un Master de Sciences Po Paris. Alice a travaillé dans le milieu associatif à São Paulo, à Bonn et à Paris, ainsi que dans l’aide au développement à Mexico et à Dakar.

Pour aller plus loin :


Reporter Brasil
http://www.reporterbrasil.org.br/biofuel/exibe.php?id=55

Sur la loi fiscale
http://64.27.23.234/pages/article.news.php?component_id=4573&component_version_id=6716&language_id=12

Le beau projet de Bovespa
http://www.bovespasocial.org.br/institucional/home.aspx

La crise ralentit les partenariats : le témoignage de Taciana Gouveia, Directrice Exécutive d’ABONG.
http://www.youphil.com/fr/article/0218-le-point-de-vue-d-une-bresilienne-engagee-23?ypcli=ano

Sur le retrait sous la pression de Syngenta du Brésil
http://www.novethic.fr/novethic/planete/environnement/ogm/syngenta_bresil_graines_discorde.jsp

Le soutien de la Norvège au Fonds Amazonie
http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/59761.htm

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire