Les parties prenantes poussent activement les entreprises à changer de comportement. Dans le même temps, la RSE est devenue de plus en plus complexe. Ce blog a vocation, modestement, à suivre ces tendances de la crise des subprimes à la guerre en Ukraine. Certaines initiatives y sont aussi mises en avant.
vendredi 26 mars 2010
Alliance d’ONG et de laboratoires pharmaceutiques contre le paludisme
DNDi, initiative Médicaments contre les Maladies Négligées (Drugs for Neglected Diseases initiative) est un partenariat public/privé indépendant engagé dans la recherche et le développement de traitements nouveaux et plus efficaces contre les maladies négligées, comme la leishmaniose, la trypanosomiase humaine africaine, la maladie de Chagas et le paludisme. Ces maladies toucheraient globalement environ 1 milliard de personnes dans le monde. A peine 10% de la recherche médicale mondiale y serait aujourd'hui consacrée, alors que ces maladies concerneraient 90% de la morbidité mondiale.
La plupart des médicaments utilisés pour traiter les maladies négligées daterait de l’ère coloniale. Chers pour les populations locales et difficiles à administrer, ils ont parfois perdu leurs vertus thérapeutiques. Certains produits utilisés contiendraient encore de l’arsenic.
DNDi a été fondé en juillet 2003 par six partenaires : le Conseil indien pour la Recherche médicale, la Fondation Oswaldo Cruz (Brésil), l'Institut Pasteur (France), l'Institut de Recherche médicale du Kenya, Médecins Sans Frontières et le ministère de la Santé de Malaisie. Le Programme spécial UNICEF/PNUD/Banque mondiale/OMS de recherche et de formation concernant les maladies tropicales (TDR) en est un observateur permanent.
Il s’agit d’une démarche originale. Selon un communiqué de presse de 2003, DNDi s'est éloigné du schéma traditionnel du partenariat public-privé : « DNDi veut placer le développement des médicaments en dehors du marché, en encourageant le secteur public à prendre davantage ses responsabilités dans le domaine de la santé. » Derrière ces batailles pour la santé, qui ont commencé au sujet du Sida, c’est aussi la question des brevets, qui est sous-jacente. Les médicaments sont-ils un bien public ? Faut-il faire sur des produits de première nécessité une marge ou vendre à prix coûtant ?
A noter que cette initiative à but non lucratif utilise les connaissances et ressources scientifiques existantes dans les pays développés. La DNDi ne mène pas elle-même les projets de recherche. DNDi compte une trentaine de permanent à Genève et ferait travailler 400 personnes dans le monde. L’ONG dispose de 6 bureaux régionaux (Brésil, Malaisie, Inde, Kenya, USA, Japon). Dans le domaine de la recherche scientifique, DNDi favorise d’ailleurs la participation de médecins et chercheurs des zones tropicales en Afrique (notamment au Congo) et en Asie.
Depuis sa création, DNDi n’a eu de cesse de stimuler l’innovation. L’association a ainsi développé deux associations thérapeutiques à dose fixe contre le paludisme (ASAQ et ASMQ). Ces deux traitements ne sont protégés par aucun brevet (ce sont des génériques) et peuvent donc être produits par plusieurs fabricants. L’Asaq est issu en 2004 d’un partenariat de DNDi avec Sanofi Aventis. Les doses sont mises à la disposition du secteur public à un prix inférieur à $1 pour les adultes et à $0,50 pour les enfants. Le journal Le Temps du 28 février 2007 titrait Asaq, « la pilule qui fait de l'ombre à Novartis : Sanofi, avec l'aide d'une ONG, casse les prix pratiqués par le géant bâlois ».
DNDi a aussi permis des avancées avec une nouvelle association thérapeutique contre la maladie du sommeil. Travaillant en partenariat avec l’industrie et les Instituts de recherche académique, DNDi a fini par constituer le plus important portefeuille de projets de recherche et de développement jamais établi pour les maladies provoquées par les kinetoplastides
Pour le Dr Bernard Pécoul, Directeur exécutif de DNDi. « Stimuler l'innovation et permettre que des traitements efficaces et abordables soient mis au point contre des maladies qui affectent les plus pauvres au monde - des malades qui n'intéressent pas le marché - constitue un défi majeur pour DNDi et ses partenaires en l'absence de sources de financements significatives et pérennes»
Financièrement, DNDi cherche à s’assurer un soutien financier équilibré entre le public et le privé, gage de flexibilité et de durabilité, tout en en préservant son indépendance. De 2003 à avril 2009, un total de 110 millions d'euros ont été engagés par DNDi pour financer ses activités. Toutefois, l’association va encore avoir besoin de 164 millions d'euros d'ici 2014 pour atteindre ses objectifs (business plan objectives).
Comme partenaire fondateur, MSF a engagé un montant de 25 millions d’euros au démarrage financement pour DNDi en 2004. Le dernier rapport annuel de DNDi pour la période 2008/2009 précisait que MSF allait injecter 18 millions d’euros supplémentaires dans les prochaines années et continuer à apporter son soutien sur le terrain et dans le domaine de la recherche clinique. La participation de l'ensemble des sections MSF à la DNDi en 2008 s élève à 3,4 millions d’euros, dont 600.000 euros pour la section française. MSF est aussi le promoteur d’une campagne de sensibilisation appelée Accès aux Médicaments Essentiels.
Fin 2008, Le portefeuille de recherche de la DNDi comportait 21 projets, à des stades de développement divers: la moitié, soit 10 projets, en phase de découverte, 4 projets en phase de développement préclinique, 5 projets en phase clinique, 1 projet est en phase d être achevé, et 1 projet est déjà disponible pour les patients.
Les trois principes clés de ce genre de modèle sont les suivants : 1) les produits doivent être abordables, 2) ils doivent être adaptés pour être utilisés dans des milieux pauvres et 3) les expertises complémentaires des secteurs public et privé doivent être mobilisés. D’autres partenariats du même type existent comme l’IAVI (International AIDS Vaccine Initiative créé en 1996) ou le MMV (Medicines for Malaria Venture, 1999).
Les partenaires conservent un rôle de plaidoyer. MSF et DNDi ont déclaré en février 2010 que la Global Health Initiative (GHI) de l'administration Obama ne va pas assez loin dans la lutte contre les maladies tropicales négligées et meurtrières. L’idée est de constituer un pipeline en recherche et développement, afin de produire des médicaments plus efficaces, plus sûrs, et accessibles aux patients le plus rapidement possible. Il s’agit de pathologies comme la leishmaniose viscérale, la maladie du sommeil, le mal de Chagas et l'ulcère de Buruli.
DNDi salue également des initiatives venues d’ailleurs. En juillet 2008, l’ONG et Sanofi-Aventis se sont félicitées de l’accord conclu par la Clinton Foundation HIV/AIDS Initiative (CHAI) dans le but de réduire le coût des associations thérapeutiques à base d'artémisinine (ACT) et la volatilité de leurs prix.
Autre évènement. Annoncé le 23 mars 2010, un accord signé par Pfizer et GlaxoSmithKline (GSK) vont fournir environ 600 millions de doses de vaccins pour les maladies à pneumocoques, une des principales causes de mortalité des enfants de moins de cinq ans dans les pays en développement. Le prix sera fixé à environ 10 pour cent du prix pratiqué dans les pays les plus riches du monde.
Les doses seront livrées au cours des dix prochaines années pour les 74 pays les plus pauvres dans le monde. The Global Alliance for Vaccines and Immunisation (Alliance GAVI), qui a négocié l'accord, et est soutenu par Bill Gates et les pays développés, doit trouver 1,5 milliard de dollars de financement supplémentaire pour couvrir le coût de fabrication et de distribution des vaccins. Pour Julian Lob-Levyt, chief executive de GAVI, cette initiative est le fruit de 4 ans de négociation et d’un travail intenses.
Pour aller plus loin :
Dndi
http://www.dndi.org/
« DNDi une ONG du 3ème type »
http://www.alliancesud.ch/fr/documentation/downloads/1-pour-1-vie/1-HV.pdf
« Des maladies très fréquentes et pourtant négligées ». Le Point. 1er février 2010.
http://www.lepoint.fr/actualites-sciences-sante/2010-02-01/des-maladies-tres-frequentes-et-pourtant-negligees/1055/0/419363
« Pfizer and DNDi to battle against HAT, VL and Chagas disease ». The Medical News. 19 novembre 2009
http://www.news-medical.net/news/20091119/Pfizer-and-DNDi-to-battle-against-HAT-VL-and-Chagas-disease.aspx
« Victoire de l’Inde contre Bayer pour l'accès aux médicaments » MSF : 11 mars 2010.
http://www.msf.fr/print.php?id=1674
Sanofi-Aventis et Medicines for Malaria Venture lancent la plus grande étude jamais consacrée à un médicament antipaludique
http://www.edubourse.com/finance/actualites.php?actu=57441
Medicines as Global Public Goods: The Governance of Technological Innovation in the New Era of Global Health by Suerie Moon. GLOBAL EALTH OVERNANCE. GHG, VII, N. 2 (F2008/S2009)
http://ghgj.org/Moon_Medicines%20as%20Global%20Public%20Goods.pdf
Deal Provides Vaccines to Poor Nations at Lower Cost. New York Times 23 mars 2010
http://www.nytimes.com/2010/03/24/business/global/24vaccine.html
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