jeudi 7 février 2013

Pour Alice Audouin, bye bye l’écologie politique, bienvenue au développement durable


Pionnière du développement durable, Alice Audouin se demande dans un nouvel ouvrage si l’écologie a vécu ses dernières heures... Pour elle, la question se pose compte tenu du recul de l’intérêt pour l’environnement sur la période récente allant du Grenelle à la campagne présidentielle 2012. Et si elle observe une « ghettoïsation » de l’écologie politique avec Eva Joly, elle rappelle en fin d’ouvrage une évidence, celle du réchauffement climatique. 

Ce livre appartient à la collection « on entend dire que », une coédition d’Eyrolles et du quotidien économique Les Echos. L’angle est intéressant dans la mesure où il est demandé aux auteurs de donner leurs points de vue sans négliger les arguments adverses. Et, les faits (sondages, opinion d’experts, graphiques) viennent appuyer le raisonnement, afin de relativiser certains préjugés ou repérer des changements de tendance. 

Dans ses conclusions, Alice Audouin estime que le développement durable, même s’il a perdu du terrain, présente un potentiel plus important que l’écologie en tant qu’idéologie. Il permet en effet plus d’échanges entre différents moteurs que sont bien sûr l’écologie, mais aussi le social et l’économique. Il est vrai que dans de nombreux projets, ces trois dimensions sont de plus en plus imbriquées, ce qui accroît leurs chances d’adoption et de réussite. Ainsi, tous les acteurs (pouvoirs publics, entreprises, associations, artistes, etc.) peuvent s’en emparer sans complexe, partager de bonnes pratiques et imaginer des solutions ad hoc. Il faut ouvrir les portes et les fenêtres.

Concernant ces sujets, Alice Audouin recense certains facteurs d'optimisme:
  • Elle exprime sa confiance dans la génération Y, 
  • Et dans la capacité d’innovation de l’homo sapiens,
  •  Certaines personnalités peuvent aussi faire bouger les lignes. 
  • Dans les médias, certains titres jouent leur rôle de sensibilisation comme TerraEco, Néoplanète ou l’Ecolomag. 
 Mais, elle souligne aussi les freins pratiques ou culturels :
  • Le retard français dans certaines technologies clés comme les énergies renouvelables. 
  • Elle cite une étude de Youphil, qui montre la versatilité des médias : ils ont eu tendance à surexploiter le filon environnemental dans un premier temps avant de faire machine arrière à partir de 2009 (ClimateGate). 
  • Un consommateur français peu concerné, soucieux de son pouvoir d’achat et échaudé par le greenwashing, même si aux Etats-Unis, la société est plus réfractaire que chez nous. 
  • Enfin, dans le mode des affaires, tout le monde ne regarde pas dans la bonne direction. Elle attribue donc des bons points (Puma, PPR, Système U, Danone, Yves Rocher, Patagonia) et des cartons rouges (BP, Tepco, APP). 
 A ce titre, cet ouvrage fait écho avec « L'entreprise responsable, une urgence » de Nicole Notat. 
Pour Alice Audouin
« Ce livre peut être lu soit comme un « écologie pour les nuls" car il offre un état des lieux exhaustif de l'écologie en politique, économie, culture, consommation ou technologie, ainsi que les dernières informations sur l'état de la planète, soit comme un outil de prospective et de réflexion, un moyen de détecter les leviers pour avancer et d’analyser les signaux faibles. »  
 Mon avis : 

Ecrit dans un style journalistique qui se prête bien au sujet, ce livre délivre une bonne photographie de la société française sous l’angle environnemental. Il est aussi dans l’air du temps, puisque Yannick Jadot, député européen Europe Ecologie Les Verts, vient de participer début février à Grenoble à un débat intitulé "Le développement durable est-il déjà has been?"

La crise économique ne facilite pas le changement, de nombreux français ayant avant tout peur de sombrer dans la précarité. Comme l’urgence sociale, le changement climatique est anxiogène. Il faut déminer le terrain par des réponses globales et de l’imagination. De leur côté, les entreprises se montrent nettement plus prudentes sur leurs actions environnementales comme en témoigne l’évolution des causes soutenues par les mécènes (cf. le baromètre de l’Admical).

Pour que la société prenne ses responsabilités, cela ne sera pas sans efforts. Alice Audouin se réfère même à certaines révolutions coperniciennes, comme l’Abolition de l’esclavage ou la création de l’UE. C’est pourquoi il reste à démontrer pragmatiquement aux Français, et au reste du monde, le bienfait de certaines solutions, sans endoctrinement. Et, bien sûr, il faut aussi faire savoir, même si c’est compliqué, car ces sujets sont parfois techniques et nécessitent de se projeter dans l’avenir. D’où l’intérêt de cet ouvrage.

On entend dire que …l’écologie, c’est fini ? », Alice Audouin, Une co-édition Eyrolles-Les Échos Éditions. Sous la direction de Jean-Claude Hazera avec les conseils et l’appui de Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des Economistes. 136 pages- 14€ 


Ecoutez l’auteur sur France Bleu 
http://www.francebleu.fr/environnement/developpement-durable/paroles-de-terriennes/alice-audouin-specialiste-du-developpement-durable 

Bio d’Alice : 
En 2001, elle participe à la création de Novethic et en dirige le marketing et la communication. En 2006 elle devient la première responsable du développement durable chez Havas Media. En 2008 elle cofonde et préside COAL, la coalition Art & Développement durable, qui crée la première passerelle entre l’art contemporain et l’environnement. Autant d’initiatives qui allient engagement et esprit d’entreprise. Alice Audouin est maître de conférences associé à l’Université de Cergy-Pontoise. Elle a déjà publié La Communication Responsable (co-auteur, Eyrolles, 2010, 2009), le roman Ecolocash (Anabet, 2007) et anime le blog Alice in Warmingland. Alice Audouin est diplômée de troisième cycle de la Sorbonne, en économie et en anthropologie 

Sommaire 

Introduction. L’heure de vérité 

Chapitre 1. Le recul du vert en politique et dans l’opinion publique Trois années de déclin Naissance des « anti-écologistes » Campagne présidentielle 2012 : l’écologie hors-jeu Grenelle Environnement : au ralenti Vers une écologie normale ? L’écologie sans gouvernance mondiale ? 

Chapitre 2. Notre consommation : le bio n’arrête pas le carbone L’éco-consommation : un idéal qui s’éloigne Consommer mieux, mais pas moins et pas plus cher Autolib’, Veja, Karma, Amap : les nouveaux champions de l’éco-consommation 

Chapitre 3. Médias : l’écologie quitte la une Les médias préfèrent-ils le carbone ? La polémique climatique fait mal Culture : un mouvement émergent 

Chapitre 4. Entreprises : entre le meilleur et le pire Un impact environnemental croissant Les défricheurs Les mauvais joueurs Génération Y : une élite différente Le test de l’Arctique 

Chapitre 5. Énergies renouvelables : l’impasse ? 1 %, est-ce bien raisonnable ? La France en retard sur presque toutes les technologies clés La culture énergétique française est-elle dépassée ? Fin du pétrole : le solaire gagnant ? 

Chapitre 6. L’effet surprise des risques globaux Une aggravation climatique en Une conjugaison de menaces L’écologie comme solution d’adaptation 

Sur ce blog : la presse et de développement durable
 http://ong-entreprise.blogspot.fr/2012/11/pour-nicole-notat-lentreprise-ne-peut_10.html

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