Un nouvel ouvrage publié au PUF en
janvier « marchés financiers, sans foi ni loi » dresse un état des
lieux de la finance mondiale huit ans après l’éclatement de la crise des
subprimes. Si certains excès sont mis à l’index, les solutions sont aussi
clairement mises sur la table. Dans les mille visages de la finance, pas de
raison de tout jeter à l’eau.
Un des
charmes de ce livre à 4 mains est d’avoir été écrit par des auteurs
complémentaires:
David Allouche, diplômé de Télécom ParisTech et de
l’ESSEC, est économiste et conférencier. Il a enseigné la finance de marché à
l’ESSEC, à l’université Paris Dauphine puis à Sciences Po Paris. Il constitue
donc un observateur externe aux marchés financiers, apte à répondre à toutes
les questions de manière simple.
Isabelle Prigent, diplômée de Sciences Po Paris, est
directeur adjoint de la communication au sein d’une institution financière.
Elle a donc vécu la crise de l’intérieur, notamment le « finance bashing » qui a frappé les
banques, une expérience qui l’a sans doute poussé à vouloir rappeler le rôle de
la finance, soutenir l’économie, même si pour les Français l’argent reste un
sujet tabou.
Les auteurs ici en photo lors du lancement du Livre à la librairie "la 25ème heure" à Paris.
Sans creuser
de manière détaillée la crise des subprimes, les auteurs rappellent qu’outre la
défaillance des banques et des agences de notation, les autres causes du
scandale ont été la complaisance du régulateur et l’endettement excessif des
ménages.
Pour les
auteurs, la finance est « amorale ». Apporter des réponses aux excès
du capitalisme doit s’effectuer dans les champs politique et réglementaire et non sur un terrain passionnel.
Lâcher
la bride aux financiers peut se révéler vite désastreux compte tenu des
capitaux, qu’ils sont amenés à brasser. Et de saluer la création en 2011 d’un
contrepouvoir à Bruxelles comme l’ONG Finance Watch.
David
Allouche et Isabelle Pringent tiennent aussi à réaffirmer qu’il n’existe pas un
financier, mais des financiers, avec de multiples visages, n’en déplaise à
François Hollande.
- Des acteurs patients, comme Blackrock, avec une vision à moyen et long terme basée sur une analyse des fondamentaux. Ils misent sur une augmentation de l’épargne, des investissements et de la croissance.
- Des acteurs impatients, qui goûtent davantage la hausse de la consommation, la réactivité, et souvent causes de volatilité.
Parmi les
points forts de ce livre :
- La mauvaise orientation de l’épargne en France, due notamment à la fiscalité.
- Le goût immodéré et irrationnel des Français pour la pierre et l’assurance vie en unités de compte.
- Le rôle souvent fantasmé des traders.
- La réduction des risques systémiques du fait du durcissement de la réglementation depuis 8 ans.
- L’importance des politiques de rémunération sur les marchés financiers.
Pour que la finance
restaure son image auprès du grand public, cela passe selon les auteurs par une
montée en puissance des investisseurs ou des prêteurs à long terme.
« Financer, c’est choisir ».
Dans ce cas
de figure, le financier responsable sélectionne ses investissements bien sûr en
fonction de la rentabilité espérée, mais tient compte de la nature des
investissements et de leurs conséquences. Il aura ainsi tendance à adopter des
comportements moins moutonniers, quitte à accepter une baisse de rentabilité à
court terme, dans l’optique d’un gain plus lointain et d’un impact différé plus
élevé.
Cela peut se
traduire de diverses formes :
- Concernant l’utilisation des droits de vote, les auteurs opposent les investisseurs institutionnels ou gérants indiciels
- Le crowdfunding, qui connaît un démarrage prometteur, responsabilise l’épargnant. Et, dans un pays comme la France, jette un pont entre les particuliers et l’économie,
- La finance confessionnelle réconcilie religion et marché,
- Le patriotisme financier, pour ceux qui condamnent la mondialisation de la finance.
- La responsabilité inter et intra-générationnelle,
- L’ISR,
- Les Green Bonds
Les
« investisseurs avancés » pourraient modifier la trajectoire des
entreprises et même des Etats, et donc à terme avoir un impact massif sur l'économie et la société, comme le
montrent les recherches de Robert G.Eccles et George Serafeim.
David
Allouche et Isabelle Pringent rappellent qu’il est curieux que les épargnants
ne sachent à quoi sert leur épargne. Il serait irresponsable de ne pas s’en
préoccuper, en se cachant derrière la complexité de la finance.
Aux financiers aussi
d’être plus pédagogues. Au Royaume-Uni, il est notable que l’Etat forme aux
finances personnelles les lycéens qui le souhaitent.
Au final, en s’appuyant sur de
nombreux exemples, les auteurs apportent des réponses claires, à savoir si les
marchés sont véritablement sans foi ni loi. Je vous laisse découvrir leurs conclusions dans
le livre.
Pour eux, les enjeux sont concrets et immédiats. Il faudra une
finance prête à se détacher des résultats trimestriels pour répondre à des
besoins en financements structurels, comme dans les PME, les infrastructures et
la lutte contre le réchauffement climatique.
Pour ma part, je pense qu’il y aura sans doute toujours des délits d’initiés et du
financement d’activités douteuses. La redécouverte de la Finance passerait à la
fois par:
- un autre Siècle des Lumières, via la connaissance pour lutter contre les préjugés les plus tenaces
- un effort de communication. Les acteurs avancés doivent expliquer ce qu’ils font et obtenir des résultats. Compte tenu de moyens de communication actuels, notamment via les réseaux sociaux, les investisseurs de long terme pourraient bien rencontrer leur public comme dans le crowdfunding.
Où se procurer cet ouvrage ?
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 – LES MARCHÉS FINANCIERS, ÉTERNELS MAL AIMÉS
Marchés d’argent, marchés tabous
Les marchés financiers responsables de tous les maux de nos sociétés ?
Marchés d’argent, marchés tabous
Les marchés financiers responsables de tous les maux de nos sociétés ?
CHAPITRE 2 – LES PRINCIPES DES MARCHÉS FINANCIERS
La diversification, un principe emprunté à la sagesse populaire
Au cœur de la finance, les principes de rémunération
Le prix comme information partagée
Des marchés schizophrènes
La diversification, un principe emprunté à la sagesse populaire
Au cœur de la finance, les principes de rémunération
Le prix comme information partagée
Des marchés schizophrènes
CHAPITRE 3 – À QUOI SERVENT LES MARCHÉS FINANCIERS
Des décisions individuelles porteuses d’utilité collective
Tous investisseurs ?
L’industrie des fonds au cœur de l’écosystème financier
Les marchés dérivés pour gérer les risques
Des décisions individuelles porteuses d’utilité collective
Tous investisseurs ?
L’industrie des fonds au cœur de l’écosystème financier
Les marchés dérivés pour gérer les risques
CHAPITRE 4 – UNE RÉGULATION RENFORCÉE ET MOINS
PARCELLAIRE
Conflits d’intérêts et manipulation des marchés financiers
Régulation, toujours plus ?
Faut-il scinder les banques ?
La régulation, souvent en retard d’une crise
Conflits d’intérêts et manipulation des marchés financiers
Régulation, toujours plus ?
Faut-il scinder les banques ?
La régulation, souvent en retard d’une crise
CHAPITRE 5 – VERS UNE APPROCHE PLUS RESPONSABLE
Pouvoir d’influence, pouvoir du contrôle
Investir selon ses croyances
Quelles perspectives pour l’investisseur responsable ?
Pouvoir d’influence, pouvoir du contrôle
Investir selon ses croyances
Quelles perspectives pour l’investisseur responsable ?
Pour aller
plus loin :
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